Alexandra Louis

Proposition de loi visant à lutter contre les violences sexuelles et sexistes

À l'assemblée nationale

Proposition de loi visant à lutter contre les violences sexuelles et sexistes

10 Février 2021

 

Avec une centaine de collègues parlementaires, dans la continuité de la Loi Schiappa, et suite à mon travail d'évaluation de cette avancée législative, nous avons déposé une proposition de loi pour mieux combattre l'inceste et les violences sexuelles sur mineurs.

Avec cette base de travail exigeante et nos propositions rédactionnelles, nous souhaitons avec la majorité présidentielle, et conformément au souhait d'Emmanuel Macron, faire évoluer le droit. Nous ne céderons ni à la facilité, ni au risque d'inconstitutionnalité.

En voici le contenu, que vous pouvez également retrouver sur le site de l'Assemblée nationale

 

 

EXPOSÉ DES MOTIFS

Mesdames, Messieurs,

Si la parole et l’écoute se sont considérablement libérées ces dernières années, force est de constater que les violences sexuelles et particulièrement celles commises à l’égard des enfants restent un tabou très ancré dans notre conscience collective, et ce d autant plus lorsqu il sagit dinceste. De nombreuses victimes restent recluses dans le silence et parfois même dans une sorte d’indifférence.

Or, les victimes sont encore trop nombreuses en France. Près de 220 000 personnes âgées entre 18 et 75 ans seraient victimes chaque année de viols, de tentatives de viol ou dattouchements sexuels. Une personne sur dix déclare avoir été victime dun acte incestueux.

La lutte contre les violences sexuelles et sexistes reste avant tout un combat sociétal. Chacune et chacun doit être acteur de cette lutte. Il sagit dabaisser le seuil de tolérance de la société à l’égard de ce fléau mais également de lui donner les moyens de réagir. Mais cette lutte se traduit également par une évolution sur un plan pénal afin de mieux réprimer les auteurs.

Le rapport d’évaluation relatif à la loi du 3 août 2018 révèle que la loi dite Schiappa a incontestablement amélioré l’édifice pénal en matière de lutte contre cette forme très particulière de délinquance avec notamment lintégration du sexisme dans le code pénal, la modification de la définition de l’élément matériel du viol qui permet de sanctionner les actes de pénétration imposés à la victime sur la personne de lauteur, la création de nouvelles infractions de voyeurisme et d’administration de substances nuisibles, la prise en compte des enfants témoins de violences, lallongement de la prescription des crimes sur mineurs et lintégration dun seuil d’âge de 15 ans dans la définition du délit dagression sexuelle et du crime de viol. 

Cette mission d’évaluation avait également pour but de dessiner des pistes d’évolution législatives pour améliorer la protection des victimes. Lors de la remise de la lettre de mission, Marlène Schiappa qui était alors Secrétaire d’État chargée de l’Égalité entre les femmes et les hommes et de la lutte contre les discriminations avait indiqué : « Ce rapport permettra de savoir si la loi est bien appliquée, si les magistrats se sont bien saisis de ce texte. Si ce n’est pas le cas, il faut aller plus loin, je m’y engage. Personne ne peut considérer que l’on peut avoir librement des rapports sexuels avec des enfants ».

La présente proposition de loi est inspirée des multiples contributions recueillies lors de la mission d’évaluation de la loi Schiappa, tout en restant axée sur laspect pénal de la lutte contre les violences sexuelles. Elle sinscrit donc dans la continuité du travail mené en 2018 et est complémentaire des diverses mesures menées par le gouvernement.

Larticle 1 tend à créer une section 4 bis au chapitre VII du titre II du livre II du code pénal intitulée « Des crimes et délits sexuels sur mineurs » afin d’y regrouper toutes les infractions afférentesAu sein de cette section seront insérées deux nouvelles infractions autonomes concernant les enfants de moins de 15 ans, victimes de violences sexuelles de la part de personnes majeures.

Le rapport d’évaluation de la loi Schiappa indique que linsertion dun seuil d’âge dans la définition du délit dagression sexuelle et du crime de viol a marqué un progrès significatif en 2018 en ce quelle a sécurisé la pratique judiciaire, mais elle ne résout pas tout.

D’une part, certaines associations et professionnels regrettent que l’interdiction des relations sexuelles entre un majeur et un mineur de moins de 15 ans ne soit pas suffisamment affirmée dans la loi.

D’autre part, l’architecture pénale actuelle ne permet pas de garantir suffisamment la spécificité de la protection des enfants. Sagissant des infractions sexuelles de viol et d’agression sexuelle, le législateur entend avant tout et historiquement protéger la liberté sexuelle à travers la recherche du consentement par les notions de contrainte, surprise, menace et violence.

Pour les mineurs de moins de 15 ans, la valeur sociétale à protéger nest pas la liberté sexuelle mais bien la protection de lintégrité physique et psychique de ces derniers. Il serait donc vain dinterroger ou même de présumer une absence de consentement à un acte sexuel car il ne peut y en avoir. Il est donc nécessaire à linstar dautres modèles européens, d’édifier des infractions autonomes.

Les agressions sexuelles telles quelles figurent actuellement dans notre droit positif ont pour point commun dexiger labsence de consentement de la victime. Cette absence de consentement résulte de lexistence rapportée dune contrainte, dune menace, dune violence ou encore dune surprise ayant conduit la victime à la relation sexuelle avec lauteur. Or, ce dispositif est requis quel que soit l’âge de la victime.

Autrement dit, les mineurs, même très jeunes, sont aujourdhui reconnus comme victimes dagressions sexuelles sil est rapporté quils nont pas consenti à la relation sexuelle avec un adulte parce quils y ont été contraints. En 2018, un seuil d’âge a été intégré dans la définition du viol et de l’agression sexuelle pour guider le juge dans son appréciation des notions de contrainte et surprise. 

Les textes actuels qui répriment les agressions sexuelles visent en effet à protéger la liberté sexuelle de chacun. Mais sagissant de jeunes mineurs, ce nest pas une liberté sexuelle que lon veut pénalement protéger. Cest en vérité la protection de lenfant en tant que tel, la sauvegarde de son intégrité physique et psychologique que lon veut pénalement garantir. Cest la raison pour laquelle il convient de faire des violences sexuelles sur mineur de 15 ans des infractions autonomes.

Dès lors que cest la sauvegarde de lintégrité physique et du développement psychologique des enfants et non plus la protection de leur liberté sexuelle qui justifie lincrimination, il nest plus utile, en conséquence, de prendre en compte le critère de contrainte. La question sur le consentement de la victime devient en effet hors‑sujet. Ainsi ces infractions autonomes ne soulèvent plus la question jusqualors posée du consentement de la victime mineure de 15 ans.

Carole Hardouin‑Le Goff, Maître de conférences à lUniversité Paris II Panthéon‑Assas explique que : « Si la défense dune liberté sexuelle appelle le juge à se placer sur le terrain de la contrainte dans la réalisation de lacte incriminé, la défense du développement physique et psychologique de lenfant lobligera à sanctionner ipso facto comme agression sexuelle tout acte sexuel intentionnel commis par un adulte sur un mineur en deçà dun certain âge. Cest cette fonction expressive du droit pénal qui « pèche » aujourdhui en ce qui concerne les abus sexuels sur mineurs en droit français ».

En outre, jusqualors, les propositions de réforme suggéraient de conserver les textes actuels des agressions sexuelles et dy intégrer une présomption selon laquelle un mineur dont l’âge est inférieur à un certain seuil serait présumé ne pas consentir à une relation sexuelle avec un adulte. Cette présomption de non consentement du mineur de 15 ans visait précisément à ce que ne soit plus posée cette question incongrue du consentement de jeunes mineurs à une relation sexuelle avec un adulte. Or, une telle présomption heurte de front des principes constitutionnels essentiels garantis au sein de la Déclaration des droits de lhomme et du citoyen tels que le respect de la présomption dinnocence et celui des droits de la défense.

La présente proposition dinfractions autonomes rompt ici totalement et délibérément avec une telle présomption de non consentement du mineur. Aucune présomption ne figure en effet dans les textes dincrimination suggérés.

Enfin, selon Carole Hardouin‑Le Goff, un tel dispositif isolant de manière autonome les violences sexuelles sur mineurs existe dans dautres systèmes juridiques, entre autres en droit pénal allemand où l’âge seuil retenu est l’âge de 14 ans et ce, sans que la Cour constitutionnelle fédérale de Karlsruhe ne lait invalidé.

Au reste, « la création des infractions autonomes dédiées aux mineurs s’inscrit dans la continuité du mouvement législatif, qui consiste à instituer des incriminations spécifiques tenant compte, soit de la qualité d’auteur, soit de celle de victime », indique Haritini Matsopoulou, professeure de droit privé et sciences criminelles à l’université Paris‑Saclay. « S’agissant, en particulier, des mineurs, leur qualité d’auteur ou de victime a toujours été prise en considération par le législateur, qui a été amené à instituer, soit des règles particulières permettant d’engager leur responsabilité pénale, soit des incriminations spécifiques dont la victime ne peut être qu’un mineur. On pourra citer, à cet égard, le bloc d’incriminations insérées dans une Section V, située dans le chapitre VII du titre II du livre II du code pénal, intitulée “De la mise en péril des mineurs” ».

Afin d’éviter l’effet couperet de ces infractions autonomes, il est prévu l’insertion de certaines exonérations de responsabilité pénale afin de prendre en compte les relations entre un très jeune majeur et un mineur de moins de quinze ans. Il convient de rappeler que le Conseil d’État dans son avis du 15 mars 2018 avait émis de sérieuses objections très argumentées quant à la création d’une infraction avec un seuil d’âge de 15 ans.

Cet article propose également de donner une véritable consécration en matière de répression à l’inceste qui n’est dans le droit actuel qu’une simple surqualification pénale qui n’emporte aucune conséquence sur le plan de la répression. Les deux infractions intégreront également la définition de l’inceste.

De même, il est indispensable de tirer les conséquences du caractère incestueux de certains agissements en permettant au juge dans les mêmes conditions que pour les infractions de viol et dagressions sexuelles, de statuer sur le retrait de l’autorité parentale lorsque lauteur en est titulaire.

L’article 2 tend à réprimer les relations incestueuses imposées par un adulte à un mineur de plus de 15 ans, là encore, sans interroger le consentement de ce dernier.

Larticle 3 prévoit de faire de linceste une réelle circonstance aggravante au crime de viol et au délit dagression sexuelle. En effet, comme indiqué dans le rapport d’évaluation de la loi Schiappa, linceste est une simple surqualification pénale et nemporte donc aucune incidence en matière de répression pénale. De nombreuses initiatives parlementaires nont jusqu’à présent pas abouti au nom de la sécurité juridique. Eu égard à l’évolution de la législation pénale et à la révélation de lampleur de ce fléau sociétal, aucun obstacle juridique ne saurait empêcher une telle évolution.

L’article 4 prévoit de refondre le délit d’exhibition sexuelle. En effet, le rapport d’évaluation de la loi Schiappa met en évidence une sérieuse lacune dans l’édifice pénal concernant le délit d’exhibition sexuelle. Certains comportements vécus de façon très traumatisante par les victimes ne sont couverts par aucune infraction et en conséquence, l’infraction d’outrage sexiste est utilisée par défaut.

Les faits en question concernent des individus qui se masturbent en public, très souvent dans les transports, sans pour autant montrer leur sexe.

Si ces faits sont perçus par les victimes, témoins et policiers comme une exhibition sexuelle, il en va tout autrement du point de vue de la Cour de cassation. La jurisprudence a, en la matière, une appréciation restrictive de l’article 222‑32 du code pénal. Cet article prévoit que « l’exhibition sexuelle imposée à la vue d’autrui dans un lieu accessible aux regards du public est punie d’un an d’emprisonnement et de 15 000 € d’amende ».

L’exhibition sexuelle ne fait l’objet d’aucune définition légale et donc est laissée à l’appréciation du juge. Or, la Cour de cassation considère que de simples gestes obscènes en direction d’un tiers, même si l’auteur tient son sexe dans la main à travers son vêtement, ne constituent pas le délit d’exhibition sexuelle. La haute juridiction précise que l’infraction suppose que « le corps ou la partie du corps volontairement exposé soit ou paraisse dénudé ([1]). » Cette jurisprudence a été confirmée par des arrêts ultérieurs ([2]).

En d’autres termes, la jurisprudence exige un élément de nudité non prévu expressément par le texte. Cette interprétation s’explique sans doute par le fait que la nudité était exigée pour qualifier l’outrage à la pudeur public, délit qui a été remplacé par le délit d’exhibition sexuelle en 1992.

L’outrage sexiste est donc utilisé dans la pratique pour venir combler cette carence juridique. Or, le niveau contraventionnel ne semble pas adapté au comportement incriminé. L’outrage sexiste a vocation à sanctionner le premier degré des violences sexistes, et de tels gestes obscènes relèvent d’un cran bien au‑dessus. De manière spontanée, les personnes confrontées à cette situation évoquent un exhibitionnisme et le vivent comme une agression. En outre, un niveau de répression délictuel permettrait d’effectuer une vérification des antécédents judiciaires de l’auteur mais également de prononcer, lorsque cela s’avère nécessaire, une peine principale ou complémentaire permettant un suivi psychologique.

Le projet de loi de 1992 précisait que « l’exhibitionnisme sexuel, volontairement infligé à un tiers, dans des lieux accessibles aux regards du public, constitue une forme d’agression contre autrui et particulièrement contre les enfants ». Dans la pratique, ce qui heurte la victime est plus l’obscénité que la seule nudité.

Nous pouvons donc nous interroger sur linterprétation quopère la Cour de cassation de lexhibition sexuelle. Caroline Duparc, Maître de conférences HDR en droit privé et sciences criminelles et Directrice de l’Institut d’études judiciaires d’Angers, explique que « Découlant du latin exhibere, “produire au jour, présenter”, le terme “exhibition” signifie “faire étalage de”, “montrer en public”. Le fait que lexhibition soit “sexuelle” implique en outre que ce qui saffiche donc publiquement soit en rapport avec le sexe ou la sexualité, ce qui conduit à réprimer lexhibition des parties sexuelles ou dactes de nature sexuelle. Le texte nindique rien de plus : lexhibition sapparente à un acte indécent sans aller obligatoirement jusqu’à la nudité, de sorte que la Cour de cassation ajoute ici une condition supplémentaire à la loi. » 

En outre, le délit d’exhibition sexuelle a défrayé la chronique à l’occasion de deux affaires concernant des activistes du mouvement des Femen qui ont été poursuivies sur le fondement de cette infraction au motif qu’elles avaient dévoilé leur poitrine en public lors d’une action militante alors même que la finalité n’était pas sexuelle.

Il est difficilement compréhensible de ne pas qualifier d’exhibition sexuelle le fait pour une personne de se masturber en public, même à travers son vêtement, mais de retenir cette qualification lorsqu’il s’agit d’une femme qui exhibe sa poitrine à des fins politiques.

Benjamin Moron‑Puech, Maître de conférences en droit privé à l’Université Paris II a proposé  de modifier l’article 222‑32 du code pénal en intégrant « l’exhibition d’un acte sexuel » au lieu de simplement une « exhibition sexuelle ». « Cela pourrait mettre fin à l’ambiguïté de l’adjectif “sexuel”, susceptible de renvoyer tant à l’exhibition des organes participant à la sexuation de notre espèce (dont les seins donc), qu’à l’exhibition d’un acte sexuel ».

L’article 5 a pour objet d’étendre à toutes les personnes participant à l’activité d’un établissement d’activités physiques et sportives et assumant des fonctions indispensables à l’organisation des manifestations sportives, compétitives ou de loisirs, les dispositifs d’honorabilité prévues par le code du sport pour les éducateurs sportifs et les dirigeants d’établissements d’activités physiques et sportives. Seront ainsi concernés les arbitres et juges sportifs, les personnels médicaux et paramédicaux, les personnes auxquelles sont confiées des fonctions d’encadrement des pratiquants, les titulaires du brevet national de sécurité et de sauvetage aquatique (BNSSA).

Comme le rappelait justement un policier durant la mission, les auteurs de violences sexuelles sur mineurs ne deviennent pas pédocriminels parce qu’ils sont au contact d’enfant, mais vont au contact des enfants car ils sont pédocriminels. Le monde du sport encadre de très nombreux mineurs qui peuvent être exposés à ces délinquants.

Puisque les personnes citées sont en contact permanent et direct avec les pratiquants sportifs, notamment les mineurs, il est important qu’ils fassent l’objet du même niveau de contrôle de la part des services de l’État et d’éventuelles mesures administratives que celui pour les éducateurs sportifs ou pour les personnels intervenants dans les accueils collectifs de mineurs.

Le dispositif verra sa pleine efficacité grâce à l’interface informatique sécurisée, développée par le Ministère des sports en lien avec celui de la Justice, permettant aux administrations d’automatiser les croisements entre les fichiers des licenciés concernés par l’obligation d’honorabilité et le fichier judiciaire des auteurs d’infractions sexuelles ou violentes (FIJAISV).

L’article 6 a pour but de créer un délit de « sextorsion », pour réprimer des comportements qui sont aujourd’hui très mal appréhendés par le droit positif. En effet, lors de la mission d’évaluation de la loi dite Schiappa, il est ressorti que certains prédateurs via internet usent de  pressions et de chantages pour contraindre des mineurs à réaliser des actes dégradants ou de nature sexuelle. À titre d’exemple, un étudiant français a contraint des enfants de douze ans à se mettre en scène en réalisant des actes sexuels. Le délinquant avait même intimé aux enfants de réaliser des actes d’auto pénétration.

Les violences sexuelles en ligne sont trop souvent minimisées du fait de leur caractère supposé virtuel. Les psychiatres et psychologues interrogés expliquent que le traumatisme de ces enfants est comparable à ceux vécus par des enfants victimes de viol ou d’agression sexuelle. L’effet des violences en ligne est d’autant plus préjudiciable qu’elles laissent sur internet des traces ineffaçables et maintiennent au‑dessus des victimes une épée de Damoclès puisque des images intimes peuvent ressurgir dans leur vie à tout moment.

Dans la pratique, ces faits sont qualifiés soit de violences ce qui prive l’infraction de sa connotation sexuelle, soit de corruption de mineur. Ce dernier délit a été décrit comme obsolète par de très nombreux praticiens du droit interrogés, lesquels estiment qu’il s’agit d’une infraction utilisée par défaut. Il n’existe pas de définition légale précise de ce délit. Dans son rapport « Protéger les mineurs victimes d’infractions sexuelles », la sénatrice Marie Mercier définit cette infraction « comme le fait pour un adulte d’imposer (éventuellement via internet) à un mineur, même de plus de quinze ans, des propos, des actes, des scènes ou des images susceptibles de le pousser à la débauche ». Cette définition ne correspond pas aux faits de « sextorsion ».

Enfin, l’article 7 a pour objectif de faire obstacle à ce que les crimes ou délits les plus anciens commis sur mineur soient prescrits, alors même que leur auteur a ultérieurement renouvelé ses agissements criminels ou délictuels.

On rappellera ici que la loi du 3 août 2018 a porté de 20 à 30 ans la prescription des crimes sexuels commis sur des mineurs, à compter de la majorité de la victime.

Lors de la mission d’évaluation, certaines victimes et professionnels ont regretté que le jeu des prescriptions conduise, dans une même affaire, à ce que certaines victimes aient le statut de partie civile et que d’autres ne puissent se présenter que comme simples témoins alors que l’auteur est le même.

Or, on peut considérer que les différents crimes ou délits commis sur des mineurs par le même auteur présentent un lien de connexité entre eux, si bien que les actes interruptifs de prescription effectués à l’occasion de la commission des nouveaux crimes ou délits par le même auteur pourront interrompre la prescription des crimes ou délits les plus anciens. La proposition de loi rétablirait ainsi l’égalité entre les victimes de crimes de même nature accomplis par le même auteur alors que, par le jeu actuel de la prescription, certaines victimes ne peuvent plus accéder au prétoire.

Bien que la connexité soit définie à l’article 203 du code de procédure pénale, la Chambre criminelle considère que ce texte n’a pas de caractère limitatif et affirme qu’il y a connexité lorsqu’il existe entre les diverses infractions des rapports étroits analogues à ceux que la loi a spécialement prévus. Ainsi, les juridictions répressives étendent‑elles abusivement le champ d’application de l’article 203 du code de procédure pénale, ce qui crée une insécurité juridique en la matière.

Pour éviter tout aléa judiciaire, il est proposé de consacrer expressément cette hypothèse de connexité. Ainsi, l’article 9‑2 du code de procédure pénale pourra être complété par un nouvel alinéa, afin de prévoir que sont considérés comme des infractions connexes les crimes ou délits sexuels commis sur des mineurs par le même auteur, qui procèdent d’une même conception, sont déterminés par la même cause et tendent au même but que ceux dont une juridiction pénale est saisie.

En réalité, cette proposition tient compte des critères dégagés par certaines solutions jurisprudentielles ([3]), qui servent à définir la notion de connexité.

 

PROPOSITION DE LOI

Article 1er

I. – Le titre II du livre II du code pénal est ainsi modifié :

1° Après la section 4 du chapitre VII, est insérée une section 4 bis ainsi rédigée :

« Section 4 bis

« Des crimes et délits sexuels sur mineurs

« Art. 227‑14‑1.  Le fait pour un majeur de commettre volontairement sur la personne dun mineur de quinze ans, alors meÌ‚me quil a connaissance de cet aÌ‚ge ou ne pouvait lignorer, un acte de pénétration sexuelle de quelque nature qu’il soit, commis sur la personne du mineur ou sur la personne de l’auteur, est puni de vingt ans de réclusion criminelle.

« Nest pas pénalement responsable le jeune majeur qui, avant lacquisition de la majorité légale, entretenait déjaÌ€ une relation continue et pérenne avec un mineur de quinze ans, sous réserve de lexistence dune situation dautorité ou de dépendance entre ce jeune majeur et ce mineur.

« Art. 227‑14‑2.  Le crime prévu à l’article 227‑14‑1 est puni de trente ans de réclusion criminelle lorsqu’il a entraîné la mort de la victime.

« Les deux premiers alinéas de l’article 132‑23 relatif à la période de sûreté sont applicables à l’infraction prévue au présent article.

« Art. 227‑14‑3.  Le crime prévu à l’article 227‑14‑1 est puni de la réclusion criminelle à perpétuité lorsqu’il est précédé, accompagné ou suivi de tortures ou d’actes de barbarie.

« Les deux premiers alinéas de l’article 132‑23 relatif à la période de sûreté sont applicables à l’infraction prévue au présent article.

« Art. 227‑14‑4.  Le crime prévu à l’article 227‑14‑1 est qualifié d’incestueux et puni de trente ans de réclusion criminelle lorsqu’il est commis par :

« 1° Un ascendant ;

« 2° Un frère, une sœur, un oncle, une tante, un neveu ou une nièce ;

« 3° Le conjoint, le concubin d’une des personnes mentionnées aux 1° et 2° ou le partenaire lié par un pacte civil de solidarité avec l’une des personnes mentionnées aux mêmes 1° et 2°, s’il a sur la victime une autorité de droit ou de fait.

« Art. 227‑14‑5.  Le fait pour un majeur de commettre volontairement sur la personne dun mineur de quinze ans, alors même quil a connaissance de cet âge ou ne pouvait lignorer, un acte de nature sexuelle, de quelque nature qu’il soit, autre que de pénétration sexuelle, est puni de dix ans d’emprisonnement et de 150 000 € d’amende.

« Nest pas pénalement responsable le jeune majeur qui, avant lacquisition de la majorité légale, entretenait déjà une relation continue et pérenne avec un mineur de quinze ans, sous réserve de lexistence dune situation dautorité ou de dépendance entre ce jeune majeur et ce mineur.

« La tentative du délit prévu au présent article est punie des mêmes peines.

« Art. 227‑14‑6.  Le délit prévu à l’article 227‑14‑5 est qualifié d’incestueux et puni de quinze ans de réclusion criminelle lorsqu’il est commis par :

« 1° Un ascendant ;

« 2° Un frère, une sœur, un oncle, une tante, un neveu ou une nièce ;

« 3° Le conjoint, le concubin d’une des personnes mentionnées aux 1° et 2° ou le partenaire lié par un pacte civil de solidarité avec l’une des personnes mentionnées aux mêmes 1° et 2°, s’il a sur la victime une autorité de droit ou de fait.

« Art. 227‑14‑7.  Lorsque la qualification d’inceste est retenue à l’encontre d’une personne titulaire sur la victime de l’autorité parentale, la juridiction de jugement doit se prononcer sur le retrait total ou partiel de cette autorité ou sur le retrait de l’exercice de cette autorité en application des articles 378 et 379‑1 du code civil.

« Elle peut alors statuer sur le retrait de cette autorité ou sur le retrait de l’exercice de cette autorité en ce qu’elle concerne les frères et sœurs mineurs de la victime.

« Si les poursuites ont lieu devant la cour d’assises, celle‑ci statue sur cette question sans l’assistance des jurés.

« Art. 227‑14‑8.  fait d’administrer à un mineur de quinze ans, à son insu, une substance de nature à altérer son discernement ou le contrôle de ses actes afin de commettre à son égard un crime ou un délit sexuel est puni de sept ans d’emprisonnement et de 100 000 € d’amende. » ;

2° La section 3 du chapitre II est ainsi modifiée :

a) Le troisième alinéa de larticle 222‑22‑1 est supprimé ;

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