Alexandra Louis

Compte-rendu du voyage d'études au Vatican et de ma rencontre avec le pape François

Vie locale

Compte-rendu du voyage d'études au Vatican et de ma rencontre avec le pape François

19 Mars 2018

Marseille, Rome : les deux villes sœurs, fondées à deux siècles d'écart, l'aînée latine, la nôtre grecque, vont se rencontrer le temps d'un instant. Je me suis envolée du dimanche 11 au mercredi 14 mars pour un voyage d'études au Vatican à l'invitation des diocèses de l'Église situés dans l'actuelle région Provence-Alpes-Côte d'Azur. On parle alors de la province ecclésiastique de Marseille, dont l'archevêque métropolitain a une sorte d'autorité sur les évêques voisins. Avec près de 250 élus, et une centaine d'accompagnants, conjoints, collaborateurs, nous avons pu découvrir et mieux connaître le fonctionnement de ce petit pays européen de 44 hectares situé au cœur de la capitale italienne, et dont le rayonnement culturel et cultuel ne peut être ignoré. Avec une douzaine de parlementaires de La République En Marche !, la représentation nationale, plus féminine que masculine au sein de la majorité présidentielle, s'est montrée curieuse et à l'écoute.

 

Comme rappelé par le Président de la République Emmanuel Macron lors de ses vœux aux autorités religieuses au début de l'année, il devient nécessaire de mettre en place un dialogue sincère et apaisé entre l'État et les Français croyants, ou culturellement proches des religions.

« Consciente que l'individu nourrit toujours une interrogation existentielle que le vide inquiète, insécurise, la laïcité se ferait alors forte de venir elle-même peupler cette zone neutre et d'incarner une sorte de foi républicaine forgée par des valeurs, des traditions érigées à leur tour en croyance universelle sur le modèle lointain du culte de l'être suprême des Jacobins. » Emmanuel Macron  (source).
 
Le Président de la République devrait se rendre prochainement à Rome pour rencontrer le pape et recevoir le statut de chanoine du Latran, titre honorifique du chef d'état français porté depuis Henri IV. François Hollande, François Mitterrand et Georges Pompidou ne s'étaient pas déplacés pour recevoir cette distinction accordée de droit par l'Église. Comme affirmé par le pape François, il faut construire des ponts plutôt que des murs. Tel est le but de ce voyage, dont le programme est consultable ici, dialoguer avec l'Église dite universelle en vue des lois bioéthiques, mais, surtout, promouvoir la culture du dialogue entre élus de tous bords, au-delà de l'étiquette partisane.

1. Rencontre avec Pietro Parolin, secrétaire d'État du Vatican
Le cardinal italien Pietro Parolin est l'équivalent du premier ministre de l'Église catholique. Il est un des plus proches collaborateurs du pape et nous a reçu dans la salle du synode des évêques. La mise en oeuvre de la "révolution François" est donc en partie de sa responsabilité. La thématique migratoire a été abordée en premier lieu. Le défi de la prise en charge décente des réfugiés de guerre et de leur intégration est clairement au centre des préoccupations occidentales et de l'évangile. Nous avons ensuite questionné la place de la femme dans l'Église. Le cardinal a répondu qu'il y avait en effet beaucoup de marge de progression possible pour que des sœurs consacrées ou des laïcs (c'est à dire des femmes qui ne sont pas religieuses, mais pratiquantes) puissent obtenir des postes à responsabilité. Il a cependant tenu à nuancer son propos en rappelant que la majorité des fidèles qui vont à la messe sont des femmes, que plusieurs employées du Vatican occupent des postes importants et que l'intercession de nombreuses Saintes est partie intégrante de la liturgie. Sur l'aspect sacramentel, c'est à dire la présence de femmes ordonnées diacres (les fameuses diaconesses du temps de l'empire romain), prêtres ou évêques, la réponse de ce haut responsable nous indique que l'avis de l'Église de Rome est tranché depuis longtemps pour des raisons théologiques. Sur une question de ma collègue députée de Paris Delphine O, on a appris que le Vatican n'entretenait pas de relation diplomatique avec la République populaire de Chine, qui refuse toute ingérence étrangère dans le fonctionnement des religions. L'empire du Milieu connaît donc deux églises : une "patriotique" rattachée au gouvernement chinois et l'autre, clandestine, en communion avec le Saint-Siège. Enfin, la thématique de la fin de vie a été abordée par un sénateur et le cardinal a souhaité que le législateur puisse trouver sur ce drame de l'existence une solution entre les deux lignes rouges définies, selon lui, par l'euthanasie et l'acharnement thérapeutique.
 

2. Rencontre avec le pape François
C'est dans la salle Clémentine du palais pontifical que les parlementaires ont pris place aux premiers rangs avec les évêques. Monseigneur Georges Pontier, archevêque de Marseille et président de la conférence épiscopale de France, a pris la parole après une entrée très applaudie du pape. Son discours était très intéressant car spécifique, factuel et optimiste, tout en n'éludant pas les principaux enjeux politiques de la Provence. Le pontife argentin a ensuite répondu par un discours en italien dont nous avions déjà reçu la traduction en français sur un imprimé à notre entrée. Je vous laisse prendre connaissance de son allocution que vous pouvez consulter ici. Nous avons ensuite eu l'occasion de rencontrer le chef de l'Église catholique individuellement pour une dizaine de secondes chacun. Une famille irakienne réfugiée dans le Var avec ses 2 enfants a offert au pape une œuvre du père de famille, qui est artiste et créateur de vitraux : un grand tableau fait à partir de pâte de verre. Fayed, l'irakien, avec sa femme Taleen, sont de Quaraqosh. Réfugiés, ils sont accueillis avec une cinquantaine d'irakiens à la paroisse de Bargemon. Cette rencontre avec le chef du plus petit état du monde fut, de l'avis de tous, un moment fort, marqué notamment par le regard bienveillant du pape.
 

3. Rencontre avec Jean-Baptiste de Franssu, directeur de la banque du Vatican
Ce laïc est un haut cadre bancaire français. Il a été mandaté par le pape pour remettre de l'ordre dans une institution décriée et souvent source de polémique. Nous avons appris de cette rencontre après le déjeuner que la banque du Vatican n'est pas réellement une banque mais plutôt un institut financier. Son nom complet est d'ailleurs l'IOR, institut pour les œuvres de religion. Il permet de gérer les comptes de celles et ceux qui, parmi le clergé, souhaitent soutenir le caractère " humaniste " des investissements de l'IOR. En effet, la banque du Vatican essaie de placer son capital dans des initiatives durables et orientées vers le bien commun. Jean-Baptiste de Franssu a insisté sur le fait qu'à son arrivée, de nombreux employés étaient humainement sympathiques mais pas suffisamment compétents. De nombreuses banques étrangères auraient ainsi abusé de ce déficit de compétence pour faire plonger l'IOR dans plusieurs scandales.
 

4. Visite de la bibliothèque vaticane
Les parlementaires ont eu le grand bonheur de pouvoir visiter la bibliothèque publique officielle de l'État du Vatican, dont l'accès est pourtant extrêmement contrôlé. Sous les voûtes blanches, où sont représentées en peinture les grands penseurs de l'humanité, se dévoilent des étagères remplies de manuscrits anciens, en toutes langues, comme le codex vaticanus, une Bible écrite au IVème siècle, une des plus anciennes du monde.
 

5. Rencontre avec Andrea Riccardi, fondateur de la communauté Sant'Egidio
"Une communauté chrétienne née en 1968 avait une certaine audace ! Le pape dit que nous sommes les enfants du concile et de son esprit". Ainsi s'exprime avec humour Andrea Riccardi, ancien ministre et proche de Mario Monti, Président du Conseil des ministres après la catastrophique mandature de Silvio Berlusconi. La communauté de laïcs Sant'Egidio, située dans le monde entier mais dont le siège est dans le quartier autrefois populaire du Trastevere, est dédiée à l'accueil des migrants fuyants les zones de guerres. Elle travaille beaucoup afin de promouvoir la paix dans le monde, comme au Mozambique en 1992 après la guerre civile. Une des raisons principales de la difficulté d'intégrer les étrangers en occident vient selon Andrea Riccardi du fait que la société est devenue individualiste. C'est ce nombrilisme que combat la communauté en amenant par exemple les habitants à prendre leurs repas avec des réfugiés de guerre. Évidemment, l'ancien ministre de la coopération internationale de Mario Monti était très à l'aise pour répondre aux questions des élus adhérents des partis identitaires sur le problème migratoire. Il soutient qu'il faut se méfier des idéologies car elles ne contiennent qu'une seule idée et que la réalité est complexe. Le fondateur ajoute qu'il convient de combattre à la fois la cause et la conséquence des migrations.
 
 
6. Rencontre avec Son Excellence Philippe Zeller, Ambassadeur de France près le Saint-Siège
La splendide et massive villa Bonaparte à Rome est occupée par le 110ème ambassadeur de la plus vieille représentation diplomatique française, datant de François Ier. On y croise le Père Michel Caucaud, conseiller ecclésiastique détaché par le diocèse de Lyon, au service de la France pour conseiller le quai d’Orsay sur les questions théologiques en rapport avec l’Église catholique. Nous avons pu échanger avec Monsieur l'ambassadeur sur la nature des relations entre la France et le Vatican, en particulier des rencontres sur la question de l'arme atomique et sur la non-prolifération de bombes nuclaires.
 
 
Couverture : L'Osservatore Romano
Photos : Guillaume Jesberger

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